Connaîtra-t-on un jour la vérité sur l’évasion des terroristes de la Mornaguia .

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Les évadés de la prison de la Mornaguia ont enfin était capturés après une cavale d’une semaine. L’histoire de cette évasion n’a pas fini de secouer l’opinion publique tunisienne, du fait de sa gravité et des circonstances qui l’entourent. Maintenant que les fugitifs sont de nouveau sous les verrous, connaîtrions-nous la vérité sur ce scandale, ou comme plusieurs autres affaires, la vérité passerait à la trappe ?

Mardi 31 octobre 2023. En début d’après-midi le ministère de l’Intérieur publiait un avis de recherche contre cinq dangereux terroristes. On nous informait que ces terroristes ont pris la fuite à l’aube de ce même mardi et ont disparu dans la nature. Il s’agit de Nader Ghanmi, impliqué dans les événements de Menzel Bourguiba et l’assassinat d’un policier, Ameur Belâzi, impliqué dans les assassinats de Chokri Belaid et Mohamed Brahmi, Ahmed Melki alias Al Somali, arrêté lors de l’opération antiterroriste de Raoud, Raed Touati, accusé d’avoir assassiné un militaire et Alaeddine Ghazouani.

Tout juste après l’annonce, des vidéos et des photos de l’évasion avaient fait le tour des réseaux sociaux. Une toute petite fenêtre d’une cellule par laquelle les terroristes ont pu s’extirper. Des barreaux de la fenêtre parfaitement sciés, une grosse aiguille, des vêtements éparpillés, une corde tendue depuis une tour de contrôle de la prison… Il n’en fallait pas moins pour alimenter les suspicions quant à la faisabilité de l’évasion dans de telles conditions sans aide extérieure. Il s’agit quand même de la prison la mieux gardée de Tunisie et tout un chacun qui a pu y aller, peut témoigner de la sévérité des contrôles. Le fabriquant des fenêtres de la prison a fait le tour des médias pour dire qu’il était impossible de les scier à moins de disposer d’outils sophistiqués, ce qui est à écarter.

Le lendemain, mercredi 1er novembre, le président de la République reçoit son ministre de l’Intérieur, Kamel Feki. Il fait des révélations tendant vers une opération orchestrée par des services étrangers avec des complicités de l’intérieur. Il démentira aussi les images qui avaient circulé sur les réseaux, affirmant que le but de leur diffusion n’était autre que de brouiller les pistes.

Le directeur de la prison est limogé. Le directeur général des services spéciaux et le directeur central des renseignements généraux sont démis de leurs fonctions. Des agents de la prison sont interpellés.

Vendredi 3 novembre, on apprenait qu’un braquage d’une agence bancaire survenu dans la matinée à Boumhel, serait du fait de deux des terrorises fugitifs. Un important dispositif est déployé. Un hélico et des unités spéciales ratissent la zone.

Dimanche 5 novembre, des photos et des vidéos circulent, toujours sur les réseaux sociaux, montrant des citoyens qui ont capturé l’un des terroristes. Al Somali a été attrapé à la cité Ettadhamen. Cependant, rien n’est confirmé du côté des autorités. Ce silence officiel a laissé place aux spéculations, l’opinion publique ne comprenant pas qu’on ne daigne pas l’éclairer sur une affaire d’une aussi grande importance.

Il aura fallu près de 48 heures pour que le ministère de l’Intérieur se prononce enfin. A l’aube de ce mardi 7 novembre 2023, on annonce que quatre terroristes ont été arrêtés, vivants, au niveau de Djebel Boukornine. Le ministère confirme également la prise d’Al Somali à Ettadhamen.

Maintenant que cette étrange affaire s’est offert un heureux dénouement, beaucoup trop de questions persistent. Le véritable dénouement serait de définir exactement comment une telle évasion a pu se faire sous le nez de tous les agents d’une prison censée être la plus sécurisée du pays. Le président de la République ayant écarté le scénario d’une fuite « classique », il est à se demander si les Tunisiens auront droit à toute la version, la vraie. Kaïs Saïed avait évoqué des complicités avec des mouvements sionistes qui tentent de déstabiliser l’État. Qu’en est-il ?

La façon avec laquelle, les terroristes ont été capturés laisse aussi perplexe. Si ces individus avaient été exfiltrés par un réseau comportant des services étrangers et des infiltrés de l’intérieur, comment se fait-il qu’ils se retrouvent livrés à eux-mêmes allant jusqu’à braquer une banque et s’exposer bêtement ? Cela sent l’amateurisme, diront certains. D’autres, tendront à penser qu’il s’agit au contraire d’une machiavélique opération de déstabilisation.

Pour dissiper toutes ces interrogations qui restent sans réponse, il est donc nécessaire que nos autorités daignent enfin nous éclairer. Cependant, il faut le dire, le passif de ce régime en la matière est bien lourd. Le mystère plane toujours sur plusieurs affaires qui ont secoué l’opinion publique.

Le courrier empoisonné parvenu au palais de Carthage, censé assassiner le Président, tombé entre les mains de sa cheffe de cabinet Nadia Akacha qui a eu un malaise, on n’en sait rien. Cela s’est passé en janvier 2021 et jusque-là cette étrange histoire n’a pas été élucidée. Pareil pour l’histoire du tunnel découvert en novembre 2021 sous une maison, supposé mener à la résidence de l’ambassadeur de France. On se souvient du chef de l’État qui s’était déplacé en personne sur les lieux, inspectant le trou béant de quelques mètres. Il y a eu aussi plusieurs annonces sur des tentatives d’assassinat visant le Président. Le ministère public avait même ouvert différentes enquêtes. Plus récemment, l’attentat perpétré par un agent sécuritaire aux alentours de la synagogue de la Ghriba à Djerba. On nous promettait des éclaircissements, rien n’est arrivé depuis le mois de mai 2023.

Ce régime est bien taiseux quand il s’agit de donner des détails sur des affaires qui nous concernent tous, en tant que citoyens. L’absence de l’information officielle est devenue la norme. Les Tunisiens n’ont donc le choix qu’entre croire les quelques bribes servies et se résigner à être traités en sujets qui n’ont pas droit à la vérité, ou la réclamer cette vérité au risque d’être taxés d’éléments perturbateurs au mieux et de traîtres au pire.

Ikhlas Latif

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