On vous croit monsieur le président, dites-nous juste pourquoi toutes ces interrogations
À part le drame que vivent les Palestiniens (devant l’hypocrisie affligeante des Occidentaux inféodés aveuglément aux Sionistes et la lâcheté légendaire des Arabes inféodés opportunément aux Occidentaux), le fait saillant de la semaine en Tunisie est l’évasion de cinq terroristes de la prison de la Mornaguia, réputée la mieux gardée en Tunisie.
Les prisonniers se sont évadés le 31 octobre. À ce jour, lundi 6 novembre 2023, le ministère de la Justice n’a pas communiqué un mot sur le sujet. Comment se sont-ils évadés, depuis quand préparaient-ils leur coup ? On n’en sait rien ! Première interrogation.
Pour trouver de l’information officielle, il a fallu attendre le président de la République qui, le 1er novembre, a donné des éclairages qui tiennent debout. Les informations de Kaïs Saïed sont-elles fiables ? Sauf à risquer de tomber sous le coup du décret 54 liberticide, je ne vais pas dire le contraire. Les propos du chef de l’État sont donc à considérer comme du Coran. De toute façon, il n’y en a pas d’autres à se mettre sous la dent.
Lors de sa rencontre avec son ministre de l’Intérieur, le président de la République a écarté la thèse de l’évasion solitaire des terroristes et a affirmé que ces derniers ont été libérés. Il a précisé que les photos de la cellule et de la prison diffusées sont fausses et qu’elles n’auraient jamais dû circuler. « Il s’agit d’une manœuvre de diversion et tous les indices et toutes les preuves laissent à penser que l’opération est préparée depuis de longs mois », affirme le président. Quelles sont ces preuves, qui a aidé les terroristes, qui les a fait sortir ? On n’en sait rien ! Deuxième interrogation.
Comment ces photos ont été prises, qui les a fait circuler, pourquoi le ministère de la Justice ne les a pas démenties ? On n’en sait rien ! Troisième interrogation.
Kaïs Saïed a enchainé ensuite pour parler de complicité avec les Sionistes et de tentative de déstabilisation de l’État. Les Sionistes seraient donc impliqués dans l’évasion de la prison la mieux gardée de Tunisie, d’après lui. Étant parti du principe que les propos présidentiels s’assimilent à du Coran, on ne va pas mettre en doute ce qu’il dit. Quels sont les éléments à sa disposition lui permettant d’avancer cela ? On n’en sait rien ! Quatrième interrogation.
Vendredi 3 novembre, quatre jours après l’évasion, une banque est braquée à Boumhel, à 35 kilomètres de la Mornaguia avec pour butin quelque vingt mille dinars. Il a fallu seulement cinq heures pour que la Garde nationale indique que deux des cinq terroristes évadés, seraient impliqués dans ce hold-up. Des photos de vidéosurveillance sont diffusées et on y devine, en effet, les terroristes. L’État, muet dans l’histoire de l’évasion, devient excellent communicateur dans l’histoire du braquage. Passons sur le fait que c’était au parquet de communiquer l’information, ça devient un détail procédurier dont l’État s’est passé depuis belle lurette.
Comment se fait-il que des terroristes aidés par des Sionistes à s’évader de la prison la mieux gardée du pays aient besoin de liquide et soient obligés de braquer une banque ? On n’en sait rien ! Cinquième interrogation.
Dimanche 5 novembre, un des terroristes est attrapé par la foule (certains disent que c’est un policier en civil), à la cité populaire et très fréquentée Ettadhamen, à 29 kilomètres de Boumhel et 17 kilomètres de Mornaguia. 24 heures après la spectaculaire arrestation, le ministère de l’Intérieur n’a rien communiqué, ni pour confirmer, ni pour infirmer l’identité de la personne arrêtée. Pourquoi le silence ? Sixième interrogation.
Comment se fait-il que la personne la plus recherchée du pays s’expose ainsi dans une cité des plus fréquentées du pays ? Il n’a même pas pris la peine de mettre une casquette et des lunettes pour se dissimuler, ni de se munir d’une arme pour se défendre. Mieux, il avait le même gilet que la personne figurant dans la photo du braquage. Comment a-t-il franchi les barrages policiers qui ont pullulé dans tout le pays ces derniers jours ? Comment se fait-il que les Sionistes qui l’ont fait évader l’ont laissé dans la nature ? Pourquoi n’est-il pas déjà dans une embarcation clandestine vers l’Italie ou une voiture vers la Libye, alors qu’il venait de braquer une banque ? On n’en sait rien ! Septième interrogation.
On note, entre-temps, le limogeage du directeur de la prison de Mornaguia (nommé il y a seulement quelques mois) et ceux du directeur général des services spéciaux et du directeur central des renseignements généraux.
Pourquoi limoge-t-on des cadres et non leurs supérieurs, responsables de leurs nominations ? Comme l’a dit le président de la République, les évadés ont des complices à l’intérieur et ceux-ci font nécessairement partie du corps sécuritaire carcéral. Qui sont-ils ? Sont-ils recherchés ? On n’en sait rien ! Huitième interrogation.
Dans cette histoire rocambolesque (romanesque dirais-je), il y a plus d’interrogations que d’informations. La partie censée donner ces informations est l’État. Sauf que l’État communique quand ça lui chante et non quand il faut. Parfois, il laisse fuiter des photos de vidéosurveillance ou de l’intérieur de la prison violant allègrement le secret de l’enquête et d’autres il ne dit même pas si la personne arrêtée à Ettadhamen est le terroriste recherché ou pas.
Le président de la République parle de Sionistes et d’aide extérieure, mais le ministère de la Justice se mure carrément dans le silence.
On limoge des directeurs laissant entendre qu’ils sont incompétents, mais on ménage les ministres qui les ont nommés. Dans tout pays qui se respecte, les ministres n’attendraient même pas leur limogeage, ils auraient démissionné d’eux-mêmes, par décence.
Bon à noter, l’évasion de Mornaguia n’est pas l’unique cette année. Il y en a eu au moins une autre, mais les médias n’en ont pas parlé à cause du décret 54.
Bon à rappeler, c’est le deuxième scandale que Kamel Feki subit cette année (après l’attentat de Djerba), mais les médias n’ont pas fait de vagues à cause du décret 54.
« Celui qui croit fragiliser l’État avec sa complicité avec les groupes sionistes, on lui dit que l’État ne peut être fragilisé et que le peuple tunisien ne peut pas douter. Nous résistons et nous protégerons l’État tunisien », s’est exclamé avec force le président de la République devant son ministre de l’Intérieur au lendemain de l’évasion.
Partant du principe que ce qu’il dit est du Coran, on n’oserait pas remettre en doute les propos de Kaïs Saïed, surtout avec son décret 54 sous la gorge.
Mais alors, si l’État n’est pas défaillant et n’est pas fragilisé, pourquoi est-il muet, pourquoi y a-t-il nominations d’incompétents, pourquoi y a-t-il des terroristes dans la nature, pourquoi y a-t-il des Sionistes infiltrés dans le commandement des prisons, pourquoi y a-t-il des pénuries, pourquoi y a-t-il une inflation à deux chiffres, pourquoi des dizaines d’opposants sont en prison poursuivis pour des motifs des plus fallacieux ? On sait pourquoi ! Et on vous croit monsieur le président, on vous croit, dites-nous juste pourquoi les Tunisiens subissent tout cela depuis que vous êtes là !