En se lançant, à 87 ans, dans son plus long et lointain voyage depuis son élection en 2013, le pape François signe un ambitieux pari auquel beaucoup ne croyaient pas, une manière de faire taire les doutes sur ses capacités à assurer sa charge.
Le périple du chef de l’Église catholique qui débute ce lundi va le conduire dans quatre pays d’Asie du Sud-Est et d’Océanie (Indonésie, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Timor oriental, Singapour) pendant douze jours.
Du 3 au 5 septembre, le souverain pontife devait avoir des échanges interreligieux en Indonésie. Avec 242 millions de musulmans, soit 87 % de sa population, l’Indonésie abrite la plus grande communauté islamique au monde. Le christianisme est minoritaire dans le pays, avec 28 millions de chrétiens soit 10,7 % de la population dont 8,5 millions de catholiques soit 3 % de la population.
Lors de ce séjour à Jakarta, le pape François rencontrera les autorités civiles et catholiques du pays. Le souverain pontife participera également à la rencontre interreligieuse qui se tiendra le jeudi 5 septembre, dans la colossale mosquée d’Istiqlal, la plus grande mosquée d’Asie du sud-est, et célébrera une messe au stade Gelora Bung Karno.
Avec les enfants des rues à Port-Moresby
Puis du 6 au 9 septembre, le pape se rendra en Papouasie-Nouvelle-Guinée. À l’inverse de l’Indonésie, la Papouasie-Nouvelle-Guinée compte 95 % de chrétiens dont plus de 60 % de protestants. Le pays, dont 40 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, a été marqué par des émeutes meurtrières en janvier dernier. Après avoir rencontré les évêques, le Premier ministre et le gouverneur général de l’île, le pape François consacrera un temps de sa visite aux enfants des rues dans une école Port-Moresby, gérée par Caritas. Une messe sera également présidée par le chef de l’Église dimanche 8 septembre, au stade Sir John Guise.
Le pape François poursuivra son voyage au Timor oriental. Dans ce pays dont plus de 96 % de la population est catholique, le Saint-Père est attendu à Dili, capitale du pays, pour rencontrer les autorités civiles. Le souverain pontife ira ensuite à la rencontre des enfants handicapés de l’école Iramãs et présidera la messe sur l’Esplanade de Taci Tolu, mardi 10 septembre.
Le souverain pontife finira sa tournée à Singapour, cité-État de 5,6 millions d’habitants comptant 26 % de bouddhistes, 17 % de chrétiens dont 4 % de catholiques. Le chef de l’Église s’entretiendra avec le président de la République et le Premier ministre, puis avec des jeunes au collège catholique de Singapour lors d’un dialogue interreligieux. Une messe sera à nouveau célébrée au stade national SportsHub, jeudi 12 septembre.
La santé fragile du pape inquiète
Au total, le pape effectuera un voyage de pas moins de 32 000 kilomètres, avec 16 discours et 43 heures de vol. Il aura fallu attendre la 12e année de son pontificat, à trois mois de ses 88 ans, pour le voir effectuer ce voyage, une promesse qu’il tenait à honorer depuis son report en 2020 en pleine crise du Covid-19.
Pourtant, il y a encore quelques semaines, peu d’observateurs l’en jugeaient capable, et les couloirs du Vatican bruissaient de doutes tant la santé du pontife argentin avait suscité l’inquiétude. À Pâques, François, qui connaît des fragilités respiratoires et se déplace en fauteuil roulant depuis 2022, avait annulé plusieurs engagements, affaibli par un état grippal qui avait relancé les spéculations sur son état de santé.
Un an après une lourde opération de l’abdomen, certains s’interrogent : est-il raisonnable d’enchaîner les messes géantes dans des stades, les cérémonies et les rencontres, avec jusqu’à huit heures de décalage horaire, à un rythme effréné ? « Le pape croit toujours qu’il faut pousser un peu plus loin », confiait récemment un haut responsable de la diplomatie vaticane. « Il se sent capable de faire ce voyage cette année. L’an prochain, ce sera moins sûr. »
Loin de vouloir réduire la voilure, Jorge Bergoglio, qui a répété ne pas envisager de renoncer tant que sa santé le permet, considère ces déplacements comme la pierre angulaire de son ministère. Avec ce 45e voyage à l’étranger, le jésuite argentin, devenu le pape le plus âgé de l’Histoire à voyager, retourne à sa vocation de pasteur de terrain : loin de la bureaucratie de la Curie romaine qu’il n’apprécie guère, le contact avec les foules semble lui redonner de l’élan.
Les contraintes liées à son état de santé sont pourtant réelles : désormais incapable de monter un escalier, il doit utiliser un monte-charge pour atteindre l’avion. Si le pape voyage avec son médecin personnel et deux infirmiers, le dispositif médical ne prévoit « pas de précautions supplémentaires » pour ce périple, a indiqué vendredi le directeur du service de presse du Saint-Siège, Matteo Bruni.
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