FIGAROVOX/ENTRETIEN – L’ancien premier ministre a annoncé mardi soir sa candidature à l’élection présidentielle de 2027. Édouard Philippe cherche ainsi à anticiper la fin du quinquennat d’Emmanuel Macron, explique David Desgouilles, qui établit un parallèle avec 1969.
David Desgouilles est chroniqueur à Marianne. Il a publié Dérapage (éd. du Rocher, 2017) et Leurs guerres perdues (éd. du Rocher, 2019).
LE FIGARO. – L’ancien premier ministre a pris de court ses proches en s’élançant prématurément dans la course à l’Élysée. Comment interpréter ce timing ?
David DESGOUILLES. – Édouard Philippe avait déjà laissé entendre à plusieurs reprises qu’il avait l’intention d’être candidat à l’élection présidentielle. Dès la création de son mouvement – plutôt que d’adhérer à LREM puis Renaissance, l’intention était là : prendre la succession d’Emmanuel Macron au terme des deux mandats.
En renouvelant clairement cette intention chez vos confrères du Point, à un moment où le président de la République se trouve en très grande difficulté après une dissolution imprudente, l’ancien premier ministre ajoutant lui-même tout le mal qu’il pense de ladite dissolution, il défie clairement Emmanuel Macron.
J’ai déjà eu l’occasion d’exprimer dans ces colonnes que la réforme constitutionnelle de 2008 empêchant d’enchaîner trois quinquennats consécutifs, obère les marges de manœuvre du président de la République, car elle permet à la succession de s’organiser dès le début du second quinquennat. Autant dire que ce phénomène est encouragé, voire multiplié, après une dissolution ratée et l’impossibilité pour le président de trouver un premier ministre.
En se déclarant dès maintenant officiellement candidat à la présidentielle et en envisageant même une élection anticipée, le maire du Havre accrédite-t-il l’idée que le chef de l’État n’a plus les moyens de relancer son mandat ?
Il tourne ostensiblement la page Macron, en effet, avec une violence symbolique qu’on n’avait pas vue depuis le départ du ministre de l’Économie de François Hollande, torpillant la candidature de ce dernier et préparant la sienne.
En janvier 1969, Georges Pompidou, remercié de Matignon à l’été 1968 s’était déclaré candidat alors qu’il restait encore au général de Gaulle trois ans et demi de mandat à faire. Peut-on établir un parallèle entre ces deux profils et ces deux annonces ?
En effet, il y a des points communs avec cet appel lancé depuis Rome par Georges Pompidou, peu avant le référendum de 1969, lequel était prévu depuis l’été précédent. En laissant entendre à ce moment précis qu’il serait candidat à la prochaine présidentielle, Georges Pompidou envoyait aux Français le message selon lequel le départ du Général de Gaulle ne serait pas si grave puisqu’il était là pour prendre la relève ; et il retirait toute la gravité d’une défaite gaulliste à un référendum. Beaucoup de gaullistes orthodoxes ont accusé ensuite Georges Pompidou d’avoir ainsi précipité la défaite, davantage encore que le «oui, mais» de Valéry Giscard d’Estaing.
Édouard Philippe lance lui ce message non pas aux Français interrogés à un référendum mais aux parlementaires du bloc central : vous pouvez bien censurer ou fragiliser les gouvernements nommés par Emmanuel Macron autant que vous voulez et le pousser à la démission, je serai là pour porter cette candidature.
Cela dit, la comparaison s’arrête là, car le duo De Gaulle-Pompidou a davantage marqué l’histoire de la Ve République que le duo Macron-Philippe. Qu’on me pardonne mais le niveau n’était pas le même.
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